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L’huile de palme durable : mythe écolo ou réalité ?

Déforestation source de pollution

L’huile de palme, sujet de discorde. L’industrie agroalimentaire en raffole tandis que les ONG de protection de la biodiversité appellent à son boycott. Certains consommateurs avertis l’évitent scrupuleusement, d’autres succombent à la facilité, sans y penser.

L’arrivée de « l’huile de palme durable » est la goutte d’huile qui fait déborder le pot de Nutella. Les consommateurs sont tantôt rassurés, tantôt perplexes. Une chose est sure : la plupart sont perdus face au manque d’informations.

Alors, que faire ? Devrions-nous boycotter l’huile de palme ? Pouvons-nous faire confiance aux productions certifiées durables

Etat des lieux d’une production massivement critiquée. 

Huile de palme et agroalimentaire : une grande histoire d’amour

Dans les supermarchés, l’huile de palme est omniprésente. Du petit-déjeuner au dîner, de notre salle de bain à notre voiture, elle s’est immiscée dans notre quotidien. L’industrie agroalimentaire profite de ses nombreux avantages, mais elle n’est pas la seule. Les produits cosmétiques et les produits d’entretien en contiennent aussi. La différence ? Ils ne sont pas obligés de l’afficher. Prudence donc… 

Allée de supermarché

En 2015, plus de 60 millions de tonnes d’huile de palme ont été produite. Cela représente un quart du marché des huiles végétales, et l’huile la plus produite de la planète (2). À croire qu’on ne peut plus s’en passer.

Pourquoi l’industrie a fait de l’huile de palme un ingrédient fétiche ? Pour son faible coût d’abord. Le palmier est connu pour ses hauts rendements et pour sa faible demande en main d’œuvre.
Une huile bon marché qui présente d’autres avantages : elle est solide à température ambiante (comme le beurre), résiste à de hautes températures et rancit peu. Bref, un ingrédient idéal qui s’intègre facilement aux processus industriels ! 

Les écolos contre l’huile de palme : Des impacts environnementaux largement dénoncés

Ce n’est plus un secret. Ce trésor de l’agroalimentaire a des effets écologiques désastreux. Cause importante du réchauffement climatique et de la destruction d’écosystèmes tropicaux, les monocultures de palmiers sont largement critiquées. Les associations environnementales, sociales et de protection animale s’unissent pour appeler à son boycott. Que lui reproche-t-on exactement ? 

La déforestation de forêts tropicales pour les plantations de palmiers

Le palmier à huile est une plante adaptée aux climats tropicaux. Sa production se fait donc logiquement dans des zones tropicales, riches en biodiversité et en forêts (5). Ces poumons planétaires sont rasés pour faire place à des champs fertiles (1). Dans les premières années, le sol est riche des nutriments accumulés pendant des milliers d’années. Rapidement, la couche d’humus s’épuise, les nutriments sont pompés. Le sol, vide et infertile, est abandonné et la culture est déplacée sur une nouvelle zone fraîchement déboisée. C’est ainsi que la déforestation se répand en Malaisie et en Indonésie (qui cumulent 90 % de la production mondiale), ainsi que dans d’autres pays d’Asie du Sud-Est, d’Amérique du Sud et d’Afrique (2).

À noter que la Malaisie déforeste énormément pour le commerce de bois, les cultures de palme n’étant pas les seules coupables du recul de la forêt (4) .

Déforestation source de pollution

Or, la déforestation est émettrice de grandes quantités de gaz à effet de serre (1). En effet, pour grandir, les arbres captent du CO2 de l’atmosphère. Lorsque l’arbre meurt naturellement, il nourrit le sol de la forêt et permet au carbone de rester en grande partie sous forme d’humus. Au contraire, déboiser de grandes surfaces libère le CO2 biogénique dans l’atmosphère, et ce malgré la plantation de palmiers. Pourquoi cela ? Car le palmier est une plante, et non pas un arbre. De ce fait, il capture trois fois moins de CO2 que les arbres tropicaux (4).

Destruction de la biodiversité et de son habitat

27 millions d’hectares. C’est la surface qu’occupent les plantations de palmiers à huile dans le monde (1). Ce sont autant d’écosystèmes, riches en biodiversité, qui ont été détruits. Habitants humains et animaux sont chassés, sans distinction. Faune et flore locales sont écrasées, sans pitié, par les champs de palmiers à huile. 

27 millions d’hectares. C’est la surface qu’occupent les plantations de palmiers à huile dans le monde. Ce sont autant d’écosystèmes, riches en biodiversité, qui ont été détruits.

Bébé orang outan
Là, c’est le moment où j’essaye de vous amadouer avec un bébé singe trop mignon.
Je sais, c’est pas correct. 

La malchance de l’huile de palme, c’est qu’elle se cultive sur une zone particulièrement riche en espèces sauvages. Les orangs-outans sont les victimes symboliques de ce commerce. Mais l’agrandissement des champs de palmier se fait au détriment de 193 espèces classées dans la liste rouge de l’UICN (5). 

L’humain aussi est affecté. Les populations autochtones sont chassées des terres, au même titre que les tigres et les gibbons. Les paysans sont forcés d’abandonner leur source d’alimentation (1).

Les conséquences de notre consommation d’huile de palme ne s’arrêtent pas aux grands animaux. La flore et la micro biodiversité des sols pâtissent aussi des monocultures

Un représentant des monocultures intensives

Pour une productivité accrue, les palmiers sont cultivés en monoculture. Ce type d’agriculture est connu pour ses impacts néfastes. Épuisement des sols, érosion, diminution de la biodiversité, demande accrue en pesticides et fertilisants, etc. À savoir que la production d’engrais consomme des énergies fossiles et que leur épandage pollue les nappes phréatiques (4). 

Mais, ne nous emportons pas. Ces conséquences ne sont pas propres à l’huile de palme, mais bien aux monocultures intensives et aux méthodes d’agriculture conventionnelles. 

Palmier à huile

Huile de palme durable : un mythe du greenwashing

RSPO, la Table Ronde pour l’Huile de Palme Durable

La RSPO (Roundtable on Sustainable Palm Oil) a été fondée en 2004 pour contrer les désastres de l’huile de palme. Cette organisation réunit de grandes parties prenantes du commerce de l’huile de palme : producteurs, fabricants, distributeurs… et le WWF. ONG de protection environnementale, le World Wildlife Fund tente de faire valoir sa vision et ses ambitions environnementales, face aux lobbies de l’agroalimentaire. Tout un programme ! 

Logo RSPO huile de palme durable

La RSPO tente d’encadrer au mieux la production d’huile de palme, au regard des valeurs sociales et environnementales actuellement bafouées.

Son but n’est pas de diminuer, encore moins d’arrêter la production (ce qui serait contre les intérêts des principaux décideurs) mais bien de rendre sa production plus raisonnable. Plus durable dans les faits, ou simplement acceptable aux yeux des consommateurs ? C’est là tout le débat. 

Une certification trop peu ambitieuse

Attention aux logo verts fièrement affichés sur les packaging. Les certifications de la RSPO ne sont pas un gage de respect environnemental. En effet, ces labels ne garantissent pas l’absence de déforestation. L’organisation refuse le défrichage de certaines zones seulement. Forêts primaires et à « haute valeur de conservation » sont sauvegardées. Les autres bois peuvent être converties en champs de palmiers (1). 

De plus, la RSPO accorde trois niveaux de certifications :

  • RSPO Segregated, le plus qualitatif, garantissant que toute l’huile du produit respecte les exigences du label,
  • RSPO Mass Balance, pour lequel seule une partie de l’huile de palme respecte le cahier des charges,
  • Green Palm, certification la moins exigeante, qui garantit seulement que l’entreprise à versé des fonds à la RSPO. En théorie, ce logo atteste que l’entreprise a soutenu la production d’autant d’huile de palme durable qu’elle n’en utilise dans un produit donné (6).

Des progrès restent à faire pour une huile vraiment durable

Les critères de durabilité sont revus régulièrement par les acteurs de la RSPO. Malheureusement, seuls 15 % de la production d’huile de palme mondiale sont concernés par l’une des certifications

Dénoncé par plusieurs ONG, le cahier des charges est considéré comme encore trop laxiste. Si des améliorations ont été faites, notamment par l’ajout d’injonctions à la réduction des émissions carbones des planteurs, aucun objectif annuel n’a été défini (4). 

Un rapport de l’UICN résume la situation par un triste constat. La certification RSPO d’huile de palme durable est, pour l’instant, peu efficace pour ralentir la déforestation (5). Elle reste une piste intéressante qu’il convient d’approfondir, pour en libérer tout le potentiel environnemental. La question est simplement… à quelle vitesse ? 

Quid de l’huile de palme bio

Quant au label bio, attention ! La certification bio interdit l’utilisation de pesticides de synthèse et de certaines méthodes intensives, mais pas la déforestation. La pastille AB n’est certainement pas un gage de respect de la forêt ou de la biodiversité, ni même d’un engagement envers la réduction des émissions carbones.

Palmier à huile et fruits

Finalement, ces labels de « fausse qualité » risquent de déculpabiliser le consommateur. Rassuré par la pastille verte, il achète son produit sans limitation éthique.

Ne tombez donc pas dans le piège et faites savoir aux industriels que vous attendez plus d’engagement de leur part ! Comment ? En achetant moins de produits tout préparés, huile durable ou non. Vous pouvez également signer des pétitions ou partager des articles en ligne dénonçant les failles des certifications (oui, j’en profite pour faire un peu de pub, discrètement 😉 ).

J’espère que cet article vous a plu et surtout que vous avez appris des choses ! Si c’est le cas, je vous invite à partager, liker et commenter pour me le faire savoir.
Pour être au courant des prochains articles, ose t’abonner. A bientôt !

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Sources 

Images libres sur Pixabay

(1) Sauvons la forêt, sur l’huile de palme https://www.sauvonslaforet.org/themes/l-huile-de-palme#start ; https://www.sauvonslaforet.org/themes/l-huile-de-palme/certification-rspo-l-huile-de-palme-peut-elle-etre-durable#start 
(2) Planetoscope https://www.planetoscope.com/Commerce/1093-production-mondiale-d-huile-de-palme.html
(3) Sauvons la forêt, sur l’huile de coco https://www.sauvonslaforet.org/themes/l-huile-de-palme/huile-de-coco#start 
(4) Encyclo ecolo https://www.encyclo-ecolo.com/Huile_de_palme
(5) Novethic https://www.novethic.fr/lexique/detail/huile-de-palme.html ; https://www.novethic.fr/actualite/environnement/biodiversite/isr-rse/boycotter-l-huile-de-palme-serait-inutile-et-ne-ferait-qu-aggraver-le-probleme-146170.html 
(6) Reporterre https://reporterre.net/L-huile-de-palme-durable-n-existe-pas
(7) Rapport de l’UICN sur l’huile de palme (2018). Le communiqué : https://uicn.fr/luicn-publie-un-nouveau-rapport-sur-lhuile-de-palme/ ; le rapport complet :  https://portals.iucn.org/library/sites/library/files/documents/2018-027-Fr.pdf

4 commentaires sur “L’huile de palme durable : mythe écolo ou réalité ?”

  1. Bonsoir.
    L’huile de palme « durable », un leurre, de la part des industriels, bien implantés dans le domaine, pour le côté lucratif..Business is..Business, et rien d’autre..
    Ce n’est guère mieux que pour le « Greenwashing »…
    Tant que les plus grands et plus gros pollueurs seront à la manoeuvre, il n’y aura aucun changement, et aucun espoir pour une réelle sauvegarde de l’environnement comme de la planète et des humains..qu’on se le dise..
    Le dernier Forum Economique Mondial de Davos est là pour nous le rappeler si besoin était..
    Je me permets, je vous mets un lien ci-dessous à ce sujet et pour le contexte..
    Au coeur du Forum de Davos (2019..)
    https://www.arte.tv/fr/videos/085426-000-A/au-coeur-du-forum-de-davos/
    Plongée inédite dans les coulisses du Forum économique mondial, qui réunit chaque année à Davos, en Suisse allemande, quelque 3 000 personnalités de premier plan.
    Intimement convaincu que les problèmes rencontrés à l’échelle mondiale ne peuvent être résolus que par le dialogue, l’Allemand Klaus Schwab – aujourd’hui âgé de 81 ans – réunit chaque année depuis 1971 quelque 3 000 personnalités issues du monde de l’économie, de la politique, de la science et de la société civile dans la petite ville suisse allemande de Davos. L’édition 2019 de cette manifestation désormais incontournable s’est déroulée dans un monde en pleine tourmente, où crise climatique, Brexit, gilets jaunes et différends commerciaux entre la Chine et les États-Unis ont tour à tour fait les gros titres des journaux. Si certains s’interrogent sur la réelle utilité de cette réunion annuelle – s’agit-il d’une vision qui porte réellement ses fruits ou d’un événement ne servant qu’à affirmer et servir les intérêts personnels d’une élite mondiale ? –, l’Américaine Jennifer Morgan, à la tête de l’organisation internationale Greenpeace, a néanmoins profité de l’occasion pour sensibiliser politiciens et chefs d’entreprise à la protection du climat.
    Pour la première fois en près de cinquante ans d’histoire du Forum économique mondial, une équipe de tournage indépendante a pu explorer les rouages de la célèbre fondation et donne à voir comment la diplomatie fonctionne entre les grands de ce monde.Plongée inédite dans les coulisses du Forum économique mondial, qui réunit chaque année à Davos, en Suisse allemande, quelque 3 000 personnalités de premier plan.
    Intimement convaincu que les problèmes rencontrés à l’échelle mondiale ne peuvent être résolus que par le dialogue, l’Allemand Klaus Schwab – aujourd’hui âgé de 81 ans – réunit chaque année depuis 1971 quelque 3 000 personnalités issues du monde de l’économie, de la politique, de la science et de la société civile dans la petite ville suisse allemande de Davos. L’édition 2019 de cette manifestation désormais incontournable s’est déroulée dans un monde en pleine tourmente, où crise climatique, Brexit, gilets jaunes et différends commerciaux entre la Chine et les États-Unis ont tour à tour fait les gros titres des journaux. Si certains s’interrogent sur la réelle utilité de cette réunion annuelle – s’agit-il d’une vision qui porte réellement ses fruits ou d’un événement ne servant qu’à affirmer et servir les intérêts personnels d’une élite mondiale ? –, l’Américaine Jennifer Morgan, à la tête de l’organisation internationale Greenpeace, a néanmoins profité de l’occasion pour sensibiliser politiciens et chefs d’entreprise à la protection du climat.
    Pour la première fois en près de cinquante ans d’histoire du Forum économique mondial, une équipe de tournage indépendante a pu explorer les rouages de la célèbre fondation et donne à voir comment la diplomatie fonctionne entre les grands de ce monde.
    Ne le prenez pas mal..
    Bonne soirée à vous et sinon fin de soirée, un très bon weekend, respectueusement..Denis.

    1. Bonjour Denis,
      Merci beaucoup pour votre commentaire !
      On est bien d’accord, les industriels pensent profit à tout prix. L’huile de palme « durable » ne l’est pas… encore. Selon moi, cela montre que les consommateurs sont de plus en plus attentifs et exigeants, et que les industriels tentent (à leur manière) d’atteindre ces exigences. À un rythme certainement trop lent… mais au moins il y a une prise de conscience globale et, bientôt peut-être, un effet boule de neige qui changera brusquement la donne. Je reste optimiste !
      Merci pour la vidéo, que je regarderai attentivement.
      Je vous invite à rester connecté, je publie un autre article sur l’huile de palme la semaine prochaine.
      Belle journée et bon week-end également,
      Bérénice

  2. Merci pour votre article qui confronte mon idée que la mention « huile de palme durable » est une arnaque
    Pour ma part je boycotte tous les produits avec huile de palme !
    Bonne journée

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