Voyager en auto stop quand on est une femme

Mon premier voyage en auto stop : témoignage

09/09/2023 – Le grand départ… Et la peur au ventre

Portrait de Bérénice qui voyage avec son sac à dos

Ça y est. C’est donc le grand départ. C’est la première fois que je me lance dans un tel voyage. 3 mois. 1 sac à dos rempli. 1 pouce pour faire du stop, comme principal moyen de transport. 1 ordi pour documenter tout ça. C’est tout.

Alors, ça y est. Je dis au revoir aux gens que j’aime… Et me voilà sur la route, pouce en l’air. Seule, à nouveau. Lancée dans une aventure dont je ne dessine pas encore les contours, les challenges, ni même les richesses à venir.

Et face à cet inconnu…

Je flippe.

J’ai peur.
Peur de ne pas en être capable finalement. Peur de ne pas réussir. Mais réussir quoi ? Je ne sais pas… mais j’ai peur.

Peur de ne pas être à la hauteur de tous les encouragements des gens autour de moi. Peur de ne pas être assez forte. De devoir rentrer. De le vivre comme un échec.

Mais ça ne sera pas un échec Bérénice. C’est tout aussi courageux de dire non avant de dépasser tes limites. C’est tout aussi fort de savoir t’écouter.
D’accord. D’accord… J’essaye d’y croire.

Mais j’ai peur.
Peur de me retrouver toute seule face à l’inconnu. Peur de me perdre.
Peur de… de…

Je ne sais pas. Tout  ça se sont des mots. Des maux qui font couler les larmes, la veille du départ. Des pensées qui prennent toute la place, pour me faire tout remettre en question.

J’ai le ventre qui se sert, par pulsation soudaine, par poignée sous ma peau. J’ai le coeur qui bat, les yeux chauds. J’ai peur.

En tout cas, une part de moi à peur, voudrait revenir en arrière et renoncer…
Et j’ai cette autre part de moi qui y croit. Qui a confiance. Qui sait pourquoi je pars… Alors, je pars.

J’ai ce juste équilibre entre la peur qui indique que j’ai tant à apprendre, la confiance qui me dit que c’est le moment d’y aller, et l’enthousiasme de tout oser et savourer sur le chemin.

Alors, je pars.

10/09 – Ma première expérience d’autostop sur une longue distance

Me voilà donc, pouce levée, prête à entrer dans la voiture d’un.e inconnu.e.

Et j’attends. Je sais qu’il faudrait sourire à chaque voiture qui passe, montrer que je suis gentille et ouverte… Mais je n’ai pas la force. Pas encore. J’attends sous le soleil, je ne sais pas ce que je fais, et j’ai peur. Donc, sourire ? Très peu pour moi, merci.

C’est la première fois que je fais du stop sur des longues distances. L’itinéraire est une angoisse pour moi. Alors, à chaque voiture qui ne s’arrête pas, je me demande : est-ce que je suis bien placée ? Dans la bonne direction ?

Et puis, il y a dans un coin de ma tête toutes ces personnes qui m’ont dit « quoi ?! Faire du stop seule, alors que tu es une femme ? C’est dangereux ! »

Et pourtant, pourtant… Voilà une voiture qui s’arrête ! Chic !

Elle me dépose à l’entrée de l’autoroute ; où je trouve rapidement une deuxième voiture pour me rapprocher de Lyon… Et enfin, une femme et sa fille m’ouvrent leur portière. Et la magie opère… J’explique mon projet, elle me dit habiter juste en face d’un habitat participatif ! Elle m’y emmène, et j’y passe ma première nuit de voyage…

Une première journée de stop qui m’a donné tellement d’optimisme et d’espoir pour la suite. J’apprends à faire confiance : oui, il y a des beaux cadeaux, des beaux hasards, des belles rencontres qui se présentent sur ma route… Il suffit de lever le pouce, et se laisser surprendre.

11/09 – L’autostop, école de la vie

Paysage de vignes, vu pendant le voyage en stop en France, Bourgogne

Me voilà lancée dans mon deuxième jour d’autostop. L’objectif est clair : me déplacer des Choux Lents (banlieue de Lyon) jusqu’à la Caserne Bascule (Joigny, à 30 min d’Auxerre environ).

Et de routes en routes, d’attente en attente, de voiture en voiture… Le trajet devient une expérience en soi.

L’autostop a ça de magique qu’il ne fait pas que nous transporter : il nous enseigne. Par les rencontres, par les galères, par les heureux hasards…

L’autostop, c’est une école de l’optimisme. Comment rester optimiste et souriante, malgré les nombreuses voitures qui ne s’arrêtent pas ?

L’autostop, c’est une école de l’ouverture à l’autre. Comment réussir à rencontrer vraiment quelqu’un, en 30 min ou 1 h, et dépasser rapidement les évidences du small talk ?

L’autostop, c’est une école du soin de soi. Comment je m’assure de rester en sécurité tout au long du trajet, que ce soit par mon emplacement, les pauses que je m’accorde ou par les personnes que je choisis de rejoindre dans leur voiture ?

L’autostop, c’est une école de l’humilité. Comment rester humble et persévérante malgré les galères, les erreurs ? Comment accepter de se tromper, sans se flageller, malgré le temps perdu ?

L’autostop, c’est une école sans horaire, où on peut changer notre rapport au temps.

L’autostop, c’est aussi une ode à la lenteur. J’apprends à me rendre à nouveau compte des distances, grâce au temps passé sur le trajet.

L’autostop, enfin, c’est un miroir du sexisme et des oppressions. C’est le terrain parfait du favoritisme de la bonne tête. C’est le lieu des mises en garde “attention, c’est dangereux pour une femme seule.” “Je vous ai prise pour éviter que quelqu’un de malveillant ne le fasse !” Comme si, en tant que femme, j’étais trop fragile, incapable de faire ce que les hommes peuvent.

Heureusement, l’autostop, ça peut aussi être (et avant tout, je l’espère) un catalyseur de sororité et d’inspiration. Une expérience pour réinventer l’entraide et la solidarité.

Ah, oui, et l’autostop, c’est aussi un moyen de transport.

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