Ah, l’écriture neutre… En 2021, les débats ont fait rage sur les bancs de l’Académie française et jusque dans nos salons. D’un côté, la communication inclusive devient indispensable : on ne peut plus invisibiliser les femmes dans le marketing et au quotidien. De l’autre, on se questionne… Faut-il enseigner le point médian à l’école, ce symbole de l’écriture inclusive permettant de combiner la terminaison masculine et féminine (ex. client·es) ? Le langage neutre est-il un combat prioritaire ?
La réponse était claire : NON. Trop compliqué, trop bizarre, trop inutile… Pourtant, rendre le langage non-sexiste est un combat essentiel pour l’égalité des genres. Quand on travaille dans la communication, adopter un langage épicène (neutre) permet de faire évoluer les mentalités. De contribuer à la reconnaissance des femmes et des différents genres. Vous vous demandez comment vous exprimer de manière inclusive sans choquer ? Vous souhaitez faire progresser l’égalité hommes-femmes, sans altérer la qualité de vos contenus marketing ? Découvrez des conseils concrets sur la communication inclusive, à travers l’écriture et le langage non-sexistes !
L’écriture neutre : pourquoi c’est important (très important) ?
Le langage façonne notre réalité
Comment une petite fille peut-elle rêver d’écrire un livre, quand elle n’entend que le mot « auteur », au masculin ?
Comment peut-elle construire son ambition et sa confiance en soi quand on lui répète « le masculin l’emporte toujours sur le féminin » ?
Comment les enfants pourraient construire leur identité quand on ne leur offre que deux options, dont l’une invisibilisée dans la langue française ?
Comment une femme experte dans son domaine peut-elle oser candidater quand on cherche « des intervenants, des conférenciers, des entrepreneurs » ?
Le langage est omniprésent. Dans nos pensées, dans nos écrits, dans nos échanges… Le langage construit notre vision du monde. Il nous permet de décrire les situations et scènes qui nous entourent, de raconter nos expériences aux personnes absentes.
Or, quand le langage n’est pas représentatif de la réalité, il crée des biais. Quand nos mots invisibilisent la moitié de l’humanité – à savoir les femmes et les personnes non identifiées comme homme… Ils poussent ces personnes à s’effacer. Quand une offre d’emploi cherche « un travailleur (H/F) », les femmes se sentent moins concernées, ont moins d’élan pour postuler (Source).
Prendre sa place de femme est bien plus difficile sans exemple de pompière, d’entrepreneuse, de peintresse… Ou sans mot pour décrire sa propre profession ! (À mesure que j’écris, je vois ces métiers féminisés se souligner en rouge… Faute d’orthographe, vraiment ? Ou un oubli de l’Académie française ?)
Le langage façonne notre réalité. Le baser sur des constats sexiste et dépassé, c’est perpétuer des inégalités. Car oui, la langue telle que nous l’employons aujourd’hui est née d’une croyance : le masculin est un sexe plus noble. Donc il l’emporte sur le féminin.
Est-ce vraiment le monde que nous souhaitons perpétuer ? La communication inclusive est un outil pour contribuer à d’autres modèles.
L’écriture non-sexiste : juste une évolution de plus pour la langue française
La langue française a évolué au fil des siècles, pour correspondre à la réalité. En 2016, l’orthographe a été modifiée pour simplifier l’usage des accents, par exemple.
Dans la décennie 2020, alors que l’égalité des genres est de plus en plus présente dans les débats de société, de nouvelles normes d’expression tentent d’apparaitre. Langage épicène, écriture neutre, grammaire égalitaire, rédaction inclusive… Autant de noms pour nommer une intention : assurer une égalité des représentations des hommes, femmes et autres genres dans nos communications.
« Cette pratique s’appuie sur deux convictions :
Source : MotsClés.
– Changer les mentalités est nécessaire pour faire progresser l’égalité.
– Pour y arriver, il faut agir sur ce par quoi elles se construisent : le langage. »
Être invisible, c’est une habitude pour des femmes
Quelles règles posent problème pour atteindre l’égalité des genres ?
- Le manque de féminisation de certains noms de métiers. Les femmes pratiquent donc ces professions dans l’invisibilisation. Les petites filles peinent à rêver d’incarner un métier « d’homme ».
- La règle de grammaire « le masculin l’emporte sur le féminin ». Un seul homme dans une foule de femmes suffit à tout accorder au masculin.
- La convention selon laquelle le langage neutre est le masculin. Par défaut, on ne représente que les hommes.
Les femmes s’habituent à ne pas être nommées, à l’être derrière les hommes. Est-ce normal ? Est-ce souhaitable ?
Faites le test : dans une salle de femmes, avec quelques hommes, utilisez le féminin neutre. Clamez des « bonjour à toutes ! » et « toutes les participantes ». Comment ces messieurs se sentent-ils ? Ignorés ? Invisibles ? Non reconnus ? Les femmes ont simplement appris à reconnaitre ce sentiment comme normal, habituel. Cela ne devrait pas l’être.
Une reconnaissance des femmes par le verbe
Nommer les femmes, c’est enfin leur dire « oui, vous existez. Oui, je vous vois. Oui, vous avez votre place dans le groupe. »
Nommer les femmes, ce n’est pas un simple caprice de féministe hystérique. C’est une nécessité. C’est une contribution à de nouveaux modèles de sociétés, plus égalitaires.
Nommer les femmes, c’est faire prendre conscience aux hommes de leur invisibilisation au quotidien, par le langage.
Nommer les femmes, et tous les genres d’ailleurs, cela n’a pas à être compliqué, décrié, oublié.
Vous pouvez adopter une écriture non-sexiste sans transformer les mots, sans déformer la grammaire française.
Voilà comment.
5 niveaux pour adopter la communication inclusive et le langage non-sexiste
1. Adopter les bases de l’écriture non-sexiste
On commence par supprimer les habitudes les plus sexistes de la langue française.
- Ne plus utiliser Hommes (oui, il y a un grand H, mais c’est quand même oublier la moitié de l’humanité, il ne faut pas se leurrer…). À la place, on emploie « humains », « les êtres humains » ou encore « l’humanité ».
- Féminiser les métiers et titres. Arrêtons d’utiliser le mot masculin pour désigner des femmes. Employez fièrement entrepreneuse, autrice, pompière, professeuse, artisane… D’ailleurs, respectons les règles de féminisation, au lieu de se contenter d’ajouter un « e » qui ne s’entend pas à l’oral ! « EntrepreneurE » ou « auteurE … Encore un moyen de ne pas trop bousculer les codes. Pourtant, la terminaison -teur devient bien -trice : acteur => actrice, auteur => autrice. La terminaison -eur devient -euse : chercheur => chercheuse, entrepreneur => entrepreneuse.
Vous vous trompez parfois ? Pas de culpabilité ! Ces habitudes bien ancrées peuvent mettre longtemps à se perdre.
2. Rendre son discours neutre, mais discrètement
Ensuite, entrainez-vous à adopter un discours non-sexiste, progressivement.
- Favoriser les mots neutres (termes épicènes, dans le jargon). Par exemple, on peut remplacer « les clients » par « la clientèle », ou « les lecteurs » par « l’audience » ou « le lectorat ».
- Utiliser les doublets, c’est-à-dire juxtaposer les mots féminin et masculin. « Tous et toutes », « les contributeurs et contributrices » ou le classique « mesdames et messieurs ». La critique ? C’est non-sexiste, mais ce n’est pas neutre ! Les personnes non binaires, par exemple, pourraient ne pas se sentir reconnues. Cela n’en fait pas une mauvaise méthode, mais c’est à garder en tête.
- Employer la tournure passive, permettant d’enlever la notion de genre. Par exemple « ils ont créé leur entreprise en 2010 » devient « l’entreprise a été créée en 2010 ». N’en abusez pas, surtout sur le web, pour garder un discours clair et fluide.
- La communication inclusive, c’est aussi dans les visuels ! Choisissez des photos représentatives de votre audience, dans toute sa diversité. Ainsi, même s’il reste des tournures au masculin, les femmes de votre lectorat se sentiront concernées.
Lorsque vous parlez ou écrivez, traquez vos phrases aux tournures sexistes, et corrigez-les progressivement. Prenez le réflexe également de repérer ces formules chez les autres, pour « reprogrammer » votre cerveau à l’écriture neutre.
Attention, une fois qu’on commence, on ne s’arrête plus ! Un exemple ? Aujourd’hui, j’ai le réflexe irrépressible de féminiser dans ma tête les discours des autres. Par exemple, si j’entends « merci à tous ! » mon cerveau ne peut s’empêcher de me murmurer « et toutes » x).
3. Oser le point médian… En le dosant habilement
Nous voilà au fameux point médian !
Il s’agit d’écrire un mot avec le deux terminaisons, masculin et féminin. Par exemple : client·es.
Le point médian est un signe de ponctuation particulier : c’est un point placé au milieu de la ligne, et non en bas. Il permet de différencier du point classique (l’utiliser génère parfois des liens dans vos textes !) et évite de mettre le féminin « entre parenthèses ».
On limite souvent l’écriture inclusive à ce fameux point médian. La méthode est critiquée car on peut perdre en lisibilité. Pourtant, remarquez que de nombreux conseils précèdent cette proposition polémique.
Oui, rendre un article neutre en utilisant seulement le point médian peut être inconfortable. Cependant, en combinant les différentes méthodes du discours non-sexiste, vous pouvez obtenir un texte éthique ET agréable à lire. Finalement, quelques points médians par article suffisent… Voire, aucun !
4. Repenser les règles de grammaire française, dans un contexte informel
Quand on ne risque de pas de vous taper sur les doigts pour ce qui est considéré comme des fautes de français, osez proposer d’autres normes d’expression.
- L’accord de proximité, une règle autrefois utilisée. Il s’agit d’accorder avec le genre du mot le plus proche. Exemple : Marc et Juliette sont entrepreneuses. Anne et Pierre sont leurs clients.
- L’accord de nombre. Il s’agit d’accorder au genre le plus représenté dans le groupe. Ainsi, on dira « bonjour à toutes » à une audience majoritairement féminine. Pour des auditoires peu habitués, n’hésitez pas à préciser votre démarche et à expliciter l’utilisation du féminin neutre. Cela évitera de perdre des clients masculins…
Souvent, cela passe inaperçu, surtout à l’oral ! Donc… Testez 😉.
5. Aller encore plus loin dans le langage épicène, dans certains milieux spécifiques
Certains mouvements vont plus loin avec la modification de règles de grammaire et orthographe. Ça peut être plus difficile à employer, selon le public. En effet, des personnes non sensibilisées à ces pratiques pourraient ne pas comprendre.
Mais de quelles méthodes parle-t-on ?
- Employer des mots-valise. Ils permettent de neutraliser des mots, en combinant le féminin et masculin. Par exemple : auditeurices (pour auditeurs et auditrices), participataires (pour participants et participantes). Cette méthode est assez facile à utiliser à l’oral et claire pour l’audience : on comprend aisément le raccourci de « rédacteurs et rédactrices » à « rédacteurices ».
- Neutraliser les terminaisons : il s’agit des morphènes. X au singulier, Z au pluriel. Par exemple : touz pour tous et toutes ; Françaix pour Françaises et Français. Oui, c’est un peu plus complexe !
Ça bouscule les codes ! C’est donc à réserver à des audiences particulièrement sensibilisées aux thématiques de genre, comme les mouvements LGBT+ ou SexPo par exemple.
SEO, lisibilité ou non sexisme ? Trouver un équilibre entre langage neutre et efficacité
L’écriture inclusive est critiquée car elle serait compliquée, non lisible, peu accessible, etc. On peut donc se demander : est-ce que cela vaut le coup d’adopter un langage non-sexiste dans son marketing ?
Les limites de l’écriture inclusive sur le web et dans une stratégie marketing
L’écriture non-sexiste est parfois contradictoire avec certaines règles de base de la rédaction web.
- Pour le SEO, il est important de développer le champ lexical de la requête clé. Or, en favorisant les termes épicènes (neutres), on doit parfois renoncer à certains mots. Par ailleurs, le point médian ne semble pas encore reconnu par les moteurs de recherche.
- Pour la lisibilité des textes, on rédige des phrases courtes et claires. Et dans l’écriture non-sexiste, on nous recommande la tournure passive et les doublets… Deux méthodes moins confortables pour la lecture web !
- Pour séduire l’audience, on s’exprime avec ses mots. Or, certaines personnes sont réfractaires à l’écriture inclusive. Elles la jugent bizarre, compliquée, inutile ou même trop politique et militante. Si une partie de votre clientèle cible a ces pensées, il vous faudra utiliser le langage neutre avec beaucoup d’attention, faire évoluer vos habitudes très progressivement et vous contenter des deux premiers niveaux (plus discrets !). Peut-être pourrez-vous lentement éduquer votre audience à ces enjeux sociaux…
Des bénéfices pour votre positionnement
Heureusement, ces contre-arguments sont compensés par des bénéfices !
De plus en plus, on attend les entreprises éthiques au tournant sur les sujets d’égalité hommes-femmes. Ainsi, si vous vous positionnez comme organisme éthique, la communication inclusive est nécessaire…
Sinon, vous risquez tout simplement de repousser les personnes pour qui l’écriture non-sexiste est importante, en particulier les femmes !
Tous vos textes, toutes vos prises de parole n’ont pas à être entièrement neutres. Cependant, limitez au maximum les phrases au masculin neutre et assurez-vous de valoriser les différents genres de votre audience.
En résumé : comment adopter le langage neutre dans une stratégie marketing efficace ?
- Adaptez les méthodes utilisées à l’audience cible. Est-elle sensibilisée à l’écriture neutre ? À la représentation des femmes et du spectre de genres dans nos sociétés ? Si oui, vous pouvez aller jusqu’au point médian, voire au-delà. Au contraire, face à une audience peu consciente de ces enjeux, contentez-vous de neutraliser discrètement vos écrits avec les niveaux 1 et 2.
- Favorisez les niveaux 1 et 2 pour adopter une écriture non-sexiste, sans déranger ou repousser les réfractaires. Entrainez-vous à les employer sans nuire à la lisibilité de vos textes : c’est tout un art !
- Autorisez-vous des « écarts » pour les endroits stratégiques : votre SEO, des pages où la lisibilité est essentielle, des articles complexes demandant des phrases simples et fluides, etc. Cela reste la langue française actuelle : on ne peut pas vous reprocher de trouver le bon dosage pour le développement de votre entreprise.
- N’hésitez pas à expliquer votre démarche, à l’intégrer à votre stratégie RSE. Montrer à votre lectorat comment le langage inclusif soutient les autres causes qui vous tiennent à cœur, contribue à de nouveaux modèles de société. Mettre en avant ces valeurs, c’est toucher plus intensément l’audience qui les partage.
- Si vous rédigez pour une entreprise cliente : expliquez-lui les enjeux de l’écriture inclusive, les différentes méthodes existantes… Mais laissez-lui le dernier mot.
S’il y a un message à retenir de cet article, c’est : oui, adopter un langage non-sexiste est essentiel. Oui, votre marketing peut être inclusif. Et ce n’est pas si compliqué. Ce changement d’habitude contribue à de réels changements de vision du monde, de représentation de la société… Donc, de nos actes quotidiens. Plusieurs méthodes existent pour adopter l’écriture inclusive, des termes épicènes aux nouveaux mots neutres, en passant par le point médian ou la tournure passive. Votre enjeu : trouver le juste équilibre pour combiner éthique et efficacité de votre stratégie marketing. Pour aller plus loin, découvrez ma nouvelle vision de la création de contenu : la communication permacole.
Sources :
- L’agence Mots-Clés.
- Une curation de contenu réalisée par Jojo (de Bleu Renard Sudio) avec de multiples sources dedans.
- Ma propre expérience !