Huile de palme : pour l’environnement, faut-il la boycotter ?

Orang outan, famille dans les arbres

Faut-il boycotter l’huile de palme ?

Les experts sont formels : les cultures de palmiers à huile sont responsables de la déforestation de zones tropicales, d’émissions de gaz à effet de serre et mettent en danger des animaux sauvages.

De nombreuses ONG appellent au boycott de l’huile de palme. Pourtant, remplacer les cultures de palmiers par d’autres oléagineux pourrait être plus délétère pour les forêts naturelles et la biodiversité qu’elles abrite.

Finalement, qu’elle est la solution pour protéger l’environnement et la biodiversité ? Devrions-nous boycotter l’huile de palme 

Remplacer l’huile de palme, fausse bonne idée

Face aux critiques environnementales et éthiques, de plus en plus d’industriels bannissent l’huile de palme. Les consommateurs se dirigent alors sereinement vers des produits estampillés « sans huile de palme ». 

Attention cependant : un ingrédient ne peut pas être simplement éliminé. Il doit être remplacé. Dans ce cas, il faut se demander si l’ingrédient de substitution est effectivement meilleur (pour l’environnement, les travailleurs, la biodiversité, etc.) que l’ingrédient initial. 

Palmier à huile et fruits
L’huile de palme est extraite de la pulpe des fruits du palmier à huile

D’où vient le succès de l’huile de palme ?

Pour savoir par quoi remplacer l’huile de palme, et avec quels impacts, voyons d’abord quels sont les avantages de cet or liquide. Car oui, même les industriels les plus mal intentionnés ne détruisent pas la forêt avec plaisir. Il y a forcément une (voire plusieurs) raison(s) à cela !

Dans le cas de l’huile de palme :

  • Un rendement exceptionnel. Le palmier à huile est l’oléagineux avec le meilleur rendement (5) (souvenez-vous en, c’est important pour la suite 😉 ). Une culture de cette plante produit quatre à cinq fois plus qu’un champ de soja (2).
  • Une huile solide à température ambiante. Comme l’huile de coco et le beurre, l’huile de palme a un point de fusion élevé (supérieur à 30 °C). Intégrée à des recettes, cette matière grasse donne donc une texture particulière.
  • Un ingrédient adapté aux processus industriels : l’huile de palme résiste à de hautes températures et rancit peu.

Meilleur rendement = moins de coûts me direz-vous.
Résistance aux processus industriels = plus de vente, insisterez-vous.
Donc les industriels, ils font tout ça pour l’argent, conclurez-vous probablement. Oui, mais pas que. 

Huile de coco, beurre, oléagineux, des alternatives écologiques ?

Souvent, l’huile de palme est remplacée par de l’huile de coco, du beurre ou d’autres oléagineux tels que le colza. 

Or, comme nous l’avons vu dans un précédent article, la production d’huile de coco a des impacts environnementaux importants. Produit de l’exploitation animale et végétale, la noix de coco a un rendement très faible. Les cocotiers ont besoin de beaucoup d’espace. Malheureusement, les surfaces séparatrices ne sont que très rarement valorisées. Les palmiers à huile demandant peu de surface, et les cocotiers en demandant beaucoup, je vous laisse faire le calcul : si l’on devait remplacer toute l’huile de palme par de l’huile de coco, il faudrait une surface beaucoup plus importante. Finalement, remplacer l’huile de palme par de l’huile de coco pousse à la destruction d’écosystèmes naturels. 

Huile et noix de coco

L’huile de coco n’est pas mauvaise en soi. La culture de cocotiers n’est pas polluante en soi. Tout comme l’huile de palme d’ailleurs. C’est l’énorme demande de l’industrie agroalimentaire qui entraîne des abus. C’est l’agriculture intensive et destructive qui fait de certaines cultures des monstres voraces. 

À lire aussi : les super-aliments qui détruisent l’environnement

Et c’est le même constat pour les autres oléagineux, tels que le colza ou le tournesol. Pour une même production, ces cultures occupent jusqu’à neuf fois plus de surface que l’huile de palme (7). Remplacer la pulpe de palme par d’autres huiles végétales augmente la surface cultivée, donc la déforestation et la destruction d’habitats naturels pour la biodiversité. 

Quant au beurre, il a un bilan carbone très mauvais. D’après l’ADEME, cette matière grasse émet presque neuf fois plus de gaz à effet de serre qu’une huile française (8). Cela est dû au fait que l’industrie laitière est liée à l’industrie de la viande, très polluante. De plus, il faut plusieurs litres de lait pour faire un kilo de beurre. 

L’huile de palme, un bouc émissaire facile

Les médias chérissent la simplicité. Les lecteurs raffolent de scandale, d’excessif. Il est beaucoup plus facile de scander « fuyez l’huile de palme » ! Que d’informer « alors oui, aujourd’hui l’huile de palme pollue. La certification durable n’est pas parfaite. Mais les autres huiles seraient pires. Alors encouragez la démarche de la RSPO et peut-être que dans quelques années les objectifs seront atteignables. »

Peu à peu, l’huile de palme est donc devenue un bouc émissaire. Victime de la simplification extrême et de la désinformation, de nombreuses ONG appellent au boycott (1). Pourtant, choisir un produit certifié sans huile de palme peut être pire qu’un produit contenant de l’huile de palme durable.

Un rapport de l’IUCN* le confirme : arrêter la production de palmier à huile déplacerait – et aggraverait – le problème sur d’autres cultures d’huile végétale (5,7).

Palmier à huile
Il a l’air tout a fait inoffensif cet arbre !

 » Les palmiers à huile produisent 35 % de toute l’huile végétale produite dans le monde, sur moins de 10 % des terres affectées aux cultures oléagineuses.  » (5)

 Boycotter l’huile de palme ne résout absolument pas le problème. Interdire la culture des palmiers déplacerait la demande mondiale sur d’autres huiles, plus gourmandes en terres et donc plus destructrices de surfaces naturelles. Remplacer l’huile de palme reviendrait à détruire un autre écosystème : plutôt que détruire des régions tropicales, on raserait d’autres forêts d’Amérique du Sud ou alors des savanes. À l’échelle mondiale, la perte de biodiversité resterait la même, si ce n’est supérieure (7). 

* UICN : Union Internationale pour la Conservation de la Nature

Éviter l’huile de palme et ses dégâts environnementaux

La RSPO et l’huile de palme durable

Je vous ai déjà parlé de l’huile de palme. Je vous conseille de lire mon autre article sur ce sujet pour mieux comprendre.

Logo RSPO huile de palme durable

Pour résumer, le label décerné par la RSPO semble aujourd’hui trop peu ambitieux pour résoudre les problèmes de déforestation ou de changement climatique.

À lire aussi : L’huile de palme durable : mythe écolo ou réalité ?

Cependant, un rapport de l’UICN bouscule nos croyances. La productivité des palmiers à huile est telle qu’il est vain de remplacer l’huile de palme par une autre huile, à consommation égale. L’ONG est donc formelle : une huile de palme VRAIMENT durable est, de loin, la meilleure solution pour la biodiversité (7).

Il est donc temps que les acteurs de la filière prennent des mesures concrètes, et s’y tiennent.

Pour le moment, l’huile de palme certifiée est à peine plus durable que l’huile conventionnelle. Du moins sur le sujet de la déforestation (5). Cependant, cette démarche très récente apparaît comme une réelle opportunité de sauvegarde des forêts. Il nous faut encourager la démarche et exiger des mesures plus ambitieuses pour développer tout le potentiel du label (5). 

Orang outan, famille dans les arbres

Et nous, on fait quoi pour sauver la planète ?

Bon, a priori aucun de nous n’est cultivateur de palmiers à huile ou décisionnaire de la recette de Nutella. Alors à notre échelle, on fait quoi ? 

D’abord, vous l’avez compris, inutile de fuir l’huile de palme. Préférez un produit avec une huile de palme durable qu’un produit avec de l’huile de coco par exemple. 

Ensuite, faites connaître votre choix. Vous pouvez vous informer sur les certifications de la RSPO et signer des pétitions pour des cultures de palmiers plus durables. 

Mais souvenez-vous : le réel problème de l’huile de palme c’est la demande mondiale excessive. La meilleure solution reste donc de réduire sa consommation personnelle. Pour cela, achetez au maximum des aliments bruts et locaux. Faites de votre mieux pour prendre du temps sur ce qui compte vraiment. Cuisinez vous-même. Faites vos courses au marché. Reprenez le pouvoir de ce qui entre dans votre assiette. 

Puisque l’huile de palme s’intègre aussi aux cosmétiques et produits ménagers, soyez vigilants. Choisissez au maximum des alternatives avec peu d’ingrédients. Voire, encore une fois, faites vous-même. En vous informant sur la démarche zéro déchet vous découvrirez que nous avons besoin de très peu de produits. 

À lire aussi : Zéro déchet : 20 bonnes résolutions pour commencer

Bref, soyez raisonnables dans vos achats. Devenez un consommateur avertis. Pas parfait, mais au moins acteur de ses choix 🙂 

Tricot, faire soi-même
L’écologie c’est comme le tricot : on y va petit à petit, mais chaque geste à un impact 😉

Voilà, j’espère que ces deux articles sur l’huile de palme t’ont plu ! Oui, ça secoue. C’est différent de ce que l’on a l’habitude d’entendre, c’est pour cela qu’il me semble important de vous le partager. 

Et toi, que penses-tu de l’huile de palme ? Quels produits choisis-tu pendant tes courses ?
N’hésite pas à me partager ton expérience en commentaire, mais aussi à aimer l’article et à le partager !
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Sources 

Images libres sur Pixabay.

(1) Sauvons la forêt, sur l’huile de palme https://www.sauvonslaforet.org/themes/l-huile-de-palme#start ; https://www.sauvonslaforet.org/themes/l-huile-de-palme/certification-rspo-l-huile-de-palme-peut-elle-etre-durable#start 
(2) Planetoscope https://www.planetoscope.com/Commerce/1093-production-mondiale-d-huile-de-palme.html
(3) Sauvons la forêt, sur l’huile de coco https://www.sauvonslaforet.org/themes/l-huile-de-palme/huile-de-coco#start 
(4) Encyclo ecolo https://www.encyclo-ecolo.com/Huile_de_palme
(5) Novethic https://www.novethic.fr/lexique/detail/huile-de-palme.html ; https://www.novethic.fr/actualite/environnement/biodiversite/isr-rse/boycotter-l-huile-de-palme-serait-inutile-et-ne-ferait-qu-aggraver-le-probleme-146170.html 
(6) Reporterre https://reporterre.net/L-huile-de-palme-durable-n-existe-pas
(7) Rapport de l’UICN sur l’huile de palme (2018). Le communiqué : https://uicn.fr/luicn-publie-un-nouveau-rapport-sur-lhuile-de-palme/ ; le rapport complet :  https://portals.iucn.org/library/sites/library/files/documents/2018-027-Fr.pdf
(8) Documentation des facteurs d’émissions de la Base Carbone, ADEME, 2014

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